Le chaudron

Le chaudron

avril 25, 2021 0 Par Karim Richard Jbeili

Le chaudron

Le problème israélo-palestinien, d’un point de vue psychologique, au fond se résume à peu de choses: Des gens venus d’ailleurs ayant l’appui d’une puissance tutélaire ont occupé une terre qui ne leur appartenait pas.  En raison de circonstances historiques particulières cette occupation a été légitimée par une instance internationale qui n’avait pas plus de droits à le faire que ceux qui ont occupé le territoire.  Depuis lors les occupants jurent leurs grands Dieux que cette terre leur appartient depuis toujours et ils le crient si fort qu’ils ont fini par le croire eux-mêmes.

Ils se retrouvent comme ce personnage d’une histoire juive, dont parle Freud, qui avait emprunté un chaudron.  L’ayant rendu en mauvais état, il disait alternativement que, d’abord il ne l’avait pas emprunté qu’ensuite il l’avait rendu  en très bon état et qu’enfin celui-ci était percé dès l’origine.  Au lieu de reconnaître dignement qu’ils ont occupé une terre qui ne leur appartenait pas, contre le gré de ses occupants et qu’ils seraient éventuellement prêts à compenser d’une façon ou d’une autre les torts irrémédiables qu’ils ont causé, ils se croient obligés de défendre par la force, avec une mauvaise foi évidente, un point de vue insoutenable en espérant que les légitimes propriétaires finissent pas le leur concéder par épuisement ou par lassitude.

Reconnaître pour eux qu’il y a eu vol de terre et colonisation n’a rien en soi de dangereux; ça élimine automatiquement le mensonge et ouvre la possibilité d’une éventuelle transaction où l’honnêteté est au rendez-vous.  Prétendre vouloir échanger la terre contre la paix est un marché de dupes dans lequel une des parties contraint l’autre à céder.  Ce n’est pas un marché librement consenti, c’est une mise à la question, c’est arracher une reconnaissance par la torture et l’humiliation.  Personne n’y trouve son compte, ni celui qui est contraint de céder ni celui qui est prétendument reconnu.  Que vaut une reconnaissance obtenue par la contrainte?

D’ailleurs à chaque fois que l’occupé a été prêt à céder sous la contrainte, à chaque fois que la paix a été sur le point d’être signée, l’occupant a considéré que les garanties n’étaient pas suffisantes, que la paix ne serait pas rassurante.  À chaque fois il a préféré la certitude de la poursuite de la guerre aux incertitudes de la paix.  Et pour être bien sûr de garantir la guerre, l’occupant finance les organisations terroristes, les provoque, les humilie, ne leur laisse d’autre recours que de réagir à la  provocation.

Ceux qui ne sont pas familiers avec la notion de traumatisme vont peut-être s’étonner que je prétende ici qu’on puisse préférer la guerre à la paix, qu’on puisse aller volontairement en somme contre ses propres intérêts.  C’est pourtant un fait avéré que les traumatisés se violentent eux-mêmes par des rêves traumatiques, des querelles avec leurs proches, une hypersensibilité au son et à la lumière, un sabotage systématique de leurs activités par des actes manqués.  Ils sont enfermés dans la jouissance de l’Autre et ne réussissent à s’en soustraire que par ces subterfuges auto-mutilateurs qui vont en apparence à l’encontre de leurs intérêts.  En réalité leur véritable intérêt est de se soustraire à la domination de l’Autre et ils sont prêts à sacrifier toutes les paix du monde à cet effet.

Les Juifs sont enfermés dans la mauvaise foi occidentale qui leur a fait croire par la mise en scène du vote de l’Assemblée Générale de l’ONU en 1948 que cette terre leur revenait de droit.  Ils sont obligés d’assumer cette mauvaise foi à leur propre compte ce qui les met dans une situation subjective insoutenable dont ils ne peuvent émerger qu’à travers des guerres incessantes et quelques moments de paix éphémères.

Il leur suffirait de dire qu’ils ont volé ces terres et qu’ils sont prêts à compenser ses anciens habitants pour que magiquement soit dénouée leur dépendance (leur prétendue dette) aux Occidentaux.  Ils seraient ainsi subjectivement libres de faire la paix.

«La clique de gauche oublie que ce n’est pas la paix qui a motivé la création d’Israël et le rassemblement de millions de Juifs, mais bien le retour à Jérusalem.  En cédant le mont du Temple aux Palestiniens, la gauche fait de nous de vulgaires occupants étrangers».  Nathan Charanski (Likoud)